Port-Réal; Debut 299.

Trois semaines, peut être un peu plus, peut être un peu moins. Mais voilà environ trois semaines que j’avais quitté le mur. Les frères jurés avec qui  j’étais partie s’étaient eparpillés au fil du trajet. Vers Vivesaigue, vers Castral-Roc – sans grand espoir – et même vers Accalmie, la recherche de recrue passait outre la guerre qui menaçait. Car oui, même la haut dans le mur nous avions entendu parler de l’armée que réunissait Robb Stark, du fait qu’Eddard Stark était prisonnier dans le donjon rouge, car l’ancienne main du roi avait soit disant fait acte de trahison, nous avions entendu parler de la mort de Robert Baratheon, et de la succession de son fils Joeffrey, mais nous n’avions pas entendu grand chose de plus. Après tout, à n’importe qui qu’appartienne le royaume, il nous fallait le protéger, c’était bien la notre serment, et il nous fallait le protéger non pas de lui même mais plutôt de ce qui se passait au delà du mur. Les Stark le répétaient bien souvent : L’hiver vient, et ils n’avaient pas tout a fait tort. Les sauvageons se manifestaient de plus en plus au Sud, enfin… pour ceux qui ne rejoignaient pas l’armée du roi d’au delà du mur, comme se faisait appeler Mance maintenant, et les frères noirs manquaient d’effectifs. C’était le but de nos voyages… De mon voyage. Enfin… Le mien était plutôt de retrouver Yoren et de m’assurer qu’il ait pu récupérer assez d’hommes, malgré les soucis de la capitale.

Bien sur, j’aurais preferé être envoyée à Vivesaigue, retrouver les joies du Conflans, passer peut être du coté de Salvemer pour m’assurer que père allait bien. Mais, non, j’avais été assignée au recrutement à Port-Réal, dans cette infecte capitale qui grouillait de milles et une maladies et vices. Peut être que ce n’était pas plus mal, je n’étais pas rentrée à Salvemer depuis plus de 8 ans maintenant, depuis que père avait refusé que je devienne chevalier, et que je me mette à écumer Westeros pour essayer de trouver quoi faire de ma vie. Qu’importait. Il n’était plus le temps des pensées, et des remords, car devant moi déjà s’ouvraient les portes de la capitale.

Laissant mon cheval à l’écurie, je me dirigeais vers le Donjon Rouge, les affaires étaient pressantes et elles n’attendaient pas. Il fallait que je retrouve Yoren, si il n’était pas déjà parti, bien sur avec la chance que j’avais – que nous avions – il serait parti depuis quelques jours à peine, et je l’aurais manqué de peu, me retrouvant  prise au dépourvu. Et comme l’on dit souvent  à parler du malheur il arrive,  et écoutant quelques conversations je me retrouvais stupéfaite d’apprendre que non seulement Yoren et ses recrues étaient déjà partie depuis au moins deux semaines, mais qu’en plus, Lord Eddard Stark avait été executé.

Et c’était ainsi que je me retrouvais à Port-Réal trainant dans les couloirs du donjon Rouge, le manteau noir sur mes épaules, la poitrine fort bandée, le visage fatigué, et l’apparence d’un chevalier éffeminé. Pas une femme non. Si je commençais à ressembler à une femme  tout serait remis en question. J’étais un Frère Juré. Et… même si ma mission initiale venait d’avorter il y’en avait une autre que je pouvais faire. Enfin, si je retrouvais mon chemin dans ces dédales.

Assise face à mon miroir je laissais une jeune femme à mon service me coiffer les cheveux. Mes pensées étaient ailleurs, loin d'ici. Les dernières semaines avaient été terribles : La condamnation de mon père pour trahison, son exécution par ma faute en quelque sorte, la disparition de ma sœur, l'absence de nouvelle de ma famille depuis, mon mariage futur avec un monstre...Rien n'allait comme je l'avais souhaité. Je souhaitais plus que tout repartir à Winterfell, faire disparaître ses affreux moments, ou oublier. Je passais ma main sur le coin inférieur de ma lèvre. Celle-ci commençait à dégonfler et la douleur s'estomper. Mais ce n'était pas le coup de Joffrey qui me faisait tant souffrir. Mon cœur saignait pour tellement de raison. Une choses était certaine : Le Nord n'allait pas oublier ni pardonner. Mais en attendant il me fallait me protéger, apprendre à mentir, apprendre à ce que l'on croit à mes mensonges, apprendre à devenir une femme de Port-Réal. _" Assez. Je me débrouillerai seule. "  La servante sembla hésiter un instant, mais mon regard ne lui laissa pas d'autres choix. J'étais Sansa Stark fille de Eddard Stark de Winterfell, promise du roi Joffrey, successeur du roi Robert Baratheon. Un titre bien long dont j'avais rêvé mais n'ayant maintenant plus vraiment de sens pour moi. Je couvrais le reste de mon visage grâce à de la poudre et me levais, enfilais le reste de ma robe. Je ne devais pas rester ici. Les ragots vont vite à Port-Réal et mieux valait-il dans ma position éviter d'être le centre de l'attention. On devait me voir m'occuper.

Je sortais me promener un peu et prendre l'air avant de me remettre à ma couture, peut être dans le jardin pour profiter du soleil. J'étais accompagnée comme toujours, peu importe. Un peu de compagnie était toujours plaisante. Je prenais un air doux et plaisant, être apprécié était chose importante ici. L'agitation habituelle régnait dans les couloirs. Il y en avait tellement, un véritable labyrinthe pour qui n'en avait pas l'habitude. Il fallait prendre des repères simples et rapidement le chemin semblait s'éclairer. Je m'arrêtais quelques instants prés d'une ouverture, contemplant quelques minutes l'horizon. Au loin je pouvais voir les bateaux quitter le port. _" Magnifique..." murmurais-je pour moi-même... J'envoyais l'une de mes servantes chercher mon ouvrage. Je souhaitais m'installer dans l'un des jardins, près de la fontaine, sous l'un des arbres. Elle disparut immédiatement alors que je reprenais mon chemin...

Les allées du donjon rouge était espacées et personne ne jetait un second regard à un corbeau du Mur, c’était … bien, c’était mieux. Je pouvais entendre en passant quelques rumeurs, mais mon oreille n’était pas la plus tendue,  j’aurais fais un mauvais espion. Tout ce que je pouvais entendre c’était ce que certains murmuraient sur mon passage, est ce que la garde la nuit restait fidèle au royaume, qu’est ce qu’il se passait… Qu’est ce que je faisais la, qui étais-je… ? Oui, mais on ne me disait rien en face, les bénéfices d’être un frère noir je suppose. Je jouais vaguement avec une mèche de cheveux que j’arrangeais dans le haut de ma cape, continuant à marcher. Ce n’est qu’une conversation qui me fit changer de chemin, les cachots et la perspective que de nouveaux prisonniers ne veuillent rejoindre la garde, attendraient, une fille, une servante probablement parlait de Dame Sansa et j’arquais les sourcils en me montrant un peu plus intéressée. J’avais fais une promesse à l’un de mes frères jurés, et il était hors de question que je ne la remplisse pas, déjà qu’il allait visiblement être très   compliqué de l’exaucer entièrement. Soit, vérifiant dans ma besace si le petit paquet était toujours la, je me rapprochais de la servante afin d’obtenir quelques informations utiles.

Une dizaine de minutes plus tard, des informations intéressantes en tête, je me dirigeais vers une petite cours intérieure, un semblant de jardin du quel on pouvait voir les ports. Les bateaux s’en allaient, et peut être que je remonterais en bateau vers Blancport, si je n’avais pas de recrue. Retraverser tout Westeros en ces temps de guerre ne m’interessait pas, et je risquais de me retrouver mêler à bien trop d’evenements pour ma propre santé. Soit. Quoi qu’il en soit, je ne tardais pas à reconnaître Dame Sansa, les yeux visiblement perdus dans le vague. Non je ne l’avais jamais vraiment vue, au mieux juste aperçue lors d’une visite à Winterfell il y’a de cela quelques années, mais rien de bien spécial . Non le seul Stark avec qui je m’étais vraiment entretenue, hormis feu Eddard, était bel et bien, celui qui n’en portait pas le nom, Jon Snow, désormais frère juré de la garde lui aussi. Et c’était pour lui qu’il allait me falloir aller m’adresser à la dame de Winterfell, désormais promise au roi Jeoffrey Baratheon. M’approchant doucement, je toussotais pour obtenir son attention, sans me soucier des gens qui l’accompagnaient, puis je m’inclinais. « Dame Sansa, pardonnez moi de vous importuner.  Pourrais-je m’entretenir avec vous quelques instants ?»  Au pire… Elle me dirait non, et je lui laisserais le petit colis. Fin de l’histoire. Mais j’esperais quand meme qu’elle me laisse le temps de m’entretenir un petit peu avec elle. Jon m’avait tellement parlé d’elle et de sa sœur.

Après tout qu'est ce qui m'empêchait de prendre un bateau et de partir loin d'ici ? Ou prendre simplement la route ? Winterfell était tout de même à un bon mois de voyage d'ici et les routes n'étaient pas sûr, surtout pour une jeune femme non accompagnée ne connaissant rien à l'art de se battre. Et puis de toute façon je ne fuirais pas. J'allais affronter les épreuves avec la tête haute. Je devais être aussi brave et forte de Robb, je le pouvais ! L’emblème de ma famille était le loup, je devais en être digne. Le limier m'avait empêché de pousser Joffrey dans le vide. Cet homme m'effrayait mais il avait raison, cette action aurait été totalement folle. Il était en tout cas fort distrayant de regarder les bateaux et de s'imaginer des histoires fantastiques et incroyables sur leurs destinations ! Où allaient-ils ? Quel était leur but ? Je me perdis ainsi quelques instants avant de rejoindre l'endroit que j'avais indiqué à ma servante pour qu'elle me ramène mon ouvrage. Je m'installais donc tranquillement accompagnée de mon "garde du corps" féminin. Je tortillais le bout d'une mèche autour de mon doigt. Mais que faisait-elle je n'allais pas attendre ainsi pendant des heures !

J'étais très pensive aujourd'hui. Un toussotement puis une voix me sortit de mes pensées. Je levais les yeux et découvrit une personne face à moi. Son visage était fatigué mais ce n'est pas la première chose que je remarquais. Cette personne portait l'habit noir. L'habit que l'on portait au mur, au Nord. Je hochais la tête en signe d'accord. On ne m'apostrophais rarement ainsi, et en général le visage m'était connu. _" Laissez nous." Les servantes s'inclinèrent avant de s'éloigner tout en gardant un œil sur moi. Je fis attention à ce que personne ne nous écoute. Ici les espions traînaient. Je n'étais pas naïve au point de croire que personne ne m'observait. Mon père m'avait déjà fait la leçon là-dessus. Il y a des choses qu'une future reine doit savoir. Je pris la parole : _" Vous êtes du mur... je veux dire... de la garde de nuit !" Plus une affirmation qu'une question. Jon y était également.Avait-il des nouvelles pour moi ? Ou un message ? De Winterfell ? De ma famille ? Peut-être saurait-il me dire si Arya était de retour... Je ne posais aucune de ses questions. _" Vous souhaitiez me parler ?" avant qu'il n'ajoute quoi que ce soit, je lui fis signe de s'avancer un peu plus vers le rebord. _" Je vous écoute..." Je ne lui demandé pas son nom. Peut-être se présenterait-il de lui-même mais d'un sens peu importe. Il n'était certainement là que pour trouver de nouvelles recrues à envoyer à la limite de nos contrées.

Lady Sansa Stark de Winterfell était une belle jeune fille de la quinzaine d’année, peut être un peu plus, peut être un peu moins, qui était bien protégée, et promise à l’homme le plus puissant des 7 courones. Cela dit, elle respirait une certaine tristesse, une mélancolie, due probablement a l’exécution de son père. Y avait elle assistée ? L’avaient ils forcé à assister à ce massacre ? L’avaient ils forcé à voir tomber la tête de celui qui l’avait crée, et elevé avec amour ? Je n’étais pas du Nord, ma région c’était le Conflans, mais Lord Eddard Stark était un homme honorable et admirable, qui m’avait toujours – ainsi que mes frères de la garde – accepté dans son foyer et nourri quand nous en avions besoin ; alors savoir qu’il n’était plus me rendait amère et un peu mal à l’aise. Quoi qu’il en soit, je me trouvais désormais face à sa fille, la seule dont nous savions la position – mais la encore je n’étais pas très bien renseignée, ce n’était pas la mon métier, ni mes préoccupations premières – et  j’étais bien décidée à converser quelques instants avec elle, lui offrant ce que Jon m’avait confié, essayant d’apprendre ce qu’elle savait de la disparition de sa sœur, et m’assurer qu’elle aille bien.

Par chance elle sembla décidé à m’accorder un peu de temps, se débarrassant de ses servantes et reconnaissant mon statut de frère juré. De…garde du mur, comme elle disait. Desormais plus personne n’était en possibilité de nous écouter, du moins je le supposais et l’esperais. Je hochais doucement la tête. « Je suis de la garde de nuit oui. » Et je supposais que mon nom ne l’interessait pas alors je ne le disais pas. Après tout, l’individualité n’existait plus vraiment sur le mur, et un nom n’avait pas d’importance. Et puis bon… Qu’étais-je si ce n’était le batard d’un banneret du seigneur Tully, qui avait fuit sa patrie pour rejoindre la garde de nuit ? Qu’importait. Elle me faisait signe de m’avancer et je la rejoignais vers un rebord eloigné de tout et de tous.

« Votre frère. Jon. Il m’a demandé de vous apporter quelque chose. »  Et je sortais adroitement le petit paquet d’une vingtaine de centimètres, enroulé dans un tissu beige. « Ne l’ouvrez pas la où des yeux peuvent se montrer trop curieux. C’est… un cadeau qui vous sera utile et vous protegera, je l’espère. » Le cadeau en question était une petite dague assez affutée, qu’elle pourrait cacher dans ses chausses ou sous sa tenue. Cela dit j’esperais qu’elle n’ait pas le besoin de s’en servir. Une dame comme elle ne devait pas être forcée à se battre, elle était encore si jeune, si… innocente. Je regardais vaguement autour de nous. « La rumeur sur la disparition de votre sœur est elle vrai ma dame ? » Pour elle aussi j’avais un cadeau, mais ce qui était le plus important je pense était de savoir où elle avait pu être, où elle avait pu aller.

A Port-Réal il faut se méfier de tout le monde. Je l'avais appris à mes dépends bien qu'on me l'ait souvent répété par le passé. Tout est une question d'apparence, si vous plaisez et ne semblez représenter aucun danger tout va bien, mais dans le cas contraire votre vie sera difficile, si ce n'est plus courte. Mon père avait été trop aventureux, il avait des principes qui ne correspondait pas à ce que l'on attendait de lui ici, il était bon et généreux, il désirait que la vérité éclate et nous protéger Arya et moi au péril de sa vie. Je ne pouvais m'empêcher de me sentir coupable. Les choses auraient pu se passer autrement. Il est souvent trop tard lorsque l'on se rend compte que l'on a tord. Ma vie était au Nord pas ici... J'accordais donc au frère juré de la garde de la nuit, quelques minutes de mon temps. Il pouvait avoir des informations précieuses pour moi. Je me débarrassais donc de mes servantes qui pouvaient avoir la langue trop pendu et je fis bien attention à ce que personne ne s'intéresse trop à nous. Il me donna un présent de la part de Jon. Ce serait mentir que de dire que cela ne me surpris pas. Il s'agissait d'un petit paquet d'une vingtaine de centimètre, enroulé dans du tissu beige. Son contenu ne ressemblait guère à ce que l'on offre à une jeune fille, je pouvais sentir le froid de l'acier à travers l'emballage. Je hochais la tête en entendant son conseil et le glissait à l'intérieur du par-dessus de ma robe. _" Remerciez le de ma part. C'est un beau présent." Je ne savais pas me servir d'une arme, du moins pas vraiment. La seule chose que je savais était que le côté pointu et tranchant était pour l'ennemi. Je saurai m'en servir au moment voulu. J'ajoutais d'une voix plus calme mais aussi plus basse : _" Dites lui également... Que le Nord n'oublie jamais." Cette phrase pouvait être tendancieuse. Il ne me fallait pas être trop précise dans mes paroles. Mais je parlais bien entendu de l'exécution de mon père et de ce que le roi Joffrey avait fait. Je ne trahissais pas ma maison. Jamais.

Je me perdais quelques instants dans mes pensées. Je tournais la tête et plongeais une fraction de seconde mon regard dans le sien avant de fixer à nouveau un point au loin. Arya... Je ne l'avais pas vu depuis ce funeste jour. J'espérais qu'elle aille bien. Elle n'était pas morte, j'en étais certaine. Si elle l'était je l'aurai su, je l'aurai sentit et si c'était par l'un des gardes de Joffrey il se serait fait un plaisir de me montrer son corps pour me torturer un peu plus. _" Les rumeurs sont exactes." Ses mots me brisèrent le coeur. Bien que Arya et moi étions très différente, elle n'en restait pas moins ma petite soeur. Je connaissais déjà sa question suivante, j'y répondis donc _" Elle est en vie... J'en ai la conviction mais je ne puis vous en dire plus..." Je faisais jouer mes doigts sur la pierre froide de façon nerveuse. Je tournais à nouveau la tête vers lui. Il était temps que je lui pose mes propres questions : _" Avez vous des nouvelles de Winterfell ?" Je n'avais aucune nouvelle, j'entendais des rumeurs comme toujours. Le roi Joffrey m'avait apprit que mon frère avait en quelque sorte levé une armée... Robb avait toujours été brave, plus brave que n'importe qui. Je risquais gros en posant cette question mais peu importe j'en avais déjà trop dis. Un jour ma naïveté me perdra...

Et c’est ainsi que j’avais pu transmettre à Sansa, l’offrande que Jon m’avait fait apporter. Le voyage avait été long, et je suppose que ça avait un petit coté risqué que de transmettre une arme à une jeune femme sous aussi grande surveillance. Mais… Jon était mon frère désormais, et les valeurs de la garde de nuit étaient les nôtres. J’aurais fais ça pour n’importe qui. D’autant plus  que le sort de la jeune Stark ne me paraissait pas enviable du tout, si cela pouvait l’aider ou la faire sourire, et bien il en serait ainsi, c’était un risque que j’avais bien voulu prendre. Elle semblait légèrement surprise, mais elle ne dit rien, me demandant juste de remercier Jon du présent. J’inclinais doucement la tête. « Je lui transmettrais vos remerciements ma dame. »  Et plus bas elle rajoutait une phrase qui bien que me semblant obscure au premier abord, avait une signification probablement bien plus importante. Le Nord n’oubliait jamais. « Il le saura. » Je préférais ne pas m’apesantir d’avantage sur de telles paroles, préférant plutôt traiter d’un autre sujet, bien qu’il soit toujours en rapport.

Et en effet les rumeurs que j’avais pu entendre depuis que j’étais arrivée ici, n’étaient pas les mêmes que les rumeurs que nous avions ouï dire sur le chemin. L’on racontait que la petite Arya avait fuit le chateau lors de l’emprisonement de son père. Quelques fractions de secondes, le regard si clair de la jeune Stark se plongea dans le mien, me permettant d’y lire une force de caractère et une détermination dont au premier abord je ne l’aurais pas jugé capable , puis tournant la tête elle reprit la parole. Ainsi les rumeurs étaient vraies, la plus jeune des filles Stark était portée disparue, était elle morte… ? La voix de Dame Sansa s’elevant à nouveau répondit à la question que je n’avais pas eu le temps de poser. Elle était en vie. Je hochais la tête, sans trouver quoi vocaliser. Que devais-je lui dire ? Lui promettre que j’essayerais de trouver sa sœur ? Nous savions bien que je n’étais qu’un frère de la garde de nuit, peut être l’un des meilleurs avec un arc, mais seul je n’arriverais jamais à retrouver une jeune enfant, surtout si elle était recherchée par les gardes du roi… par l’armée, surtout en temps de guerre. Devais-je lui dire de ne pas s’inquieter ? Que sa sœur était débrouillarde ? Je n’en savais que ce que Benjen et Jon m’avait raconté, que ce que j’avais aperçu lors des rares fois où j’étais allée à Port-Réal. Non, je restais donc muette quelques instants, perdant mon regard dans l’horizon, sur ces bateaux qui quittaient le port. J’étais… pressée de quitter cette ville, et pourtant je venais à peine d’y arriver…

Cependant, Sansa avait visiblement une question, et celle ci me fit arquer un sourcil de curiosité, alors que je faisais mine de réfléchir. Il était risqué pour elle de s’inquieter pour le Nord, et j’osais espérer que personne ne l’entende. De ma voix la plus basse, je lui répondais donc. « Winterfell se porte… comme elle doit se porter, et repose désormais sur les épaules de votre jeune frère. Robb Stark lui, a convoqué ses bannerets pour réunir une armée, et je ne doute pas que ses victoires se fassent bientôt entendre, mais je suis au regret de n’en savoir plus ma dame.» Et j’étais réellement désolée de ne pouvoir lui en apprendre d’avantage. Cependant, sur le même ton je rajoutais d’une voix douce.  «  Puis-je fais quelque chose pour vous ? » Cette proposition incluait tellement de chose, du simple remerciement à apporter à Jon, jusqu'à envoyer un corbeau à Robb Stark, ou bien même… lui procurer une autre arme ; elle était la fille d’Eddard Stark, un homme qui avait tout mon respect, et qui avait était visiblement tué alors que l’on bafouait son honneur, elle était également descendante des Tully à qui ma famille avait preté allégeance, et elle était la sœur de l’un de mes frères jurés. Dans les mesures du possibles, je l’aiderais si j’en étais capable.  

L'arme maintenant en ma possession et bien enfouis sous mes vêtements à l'abris des nombreux regards indiscret qui ne cessaient de me surveiller, je pris le temps de lui demander de remercier Jon. Mère avait beau dire qu'il s'agissait d'un bâtard qui ne sera jamais un Stark, je ne faisais pas la différence. D'autant que pour l'instant il était en quelque sorte la seule personne m'ayant aidé à sa façon. J'ajoutais également avec un grand sang froid une phrase plus lourde de sens. Le Nord allait finir par se venger. Il était plus que temps que le Nord montre de quoi il était capable à ses lions. Les loups aussi sont dangereux. Mais contrairement à un lion, le loup à une force insoupçonné. Saviez vous que le meilleur moyen pour cet animal de se fondre dans la masse et d'endormir la vigilance était de se transformer en chien de compagnie ? Mais même un chien de compagnie, bien apprivoisée mord au moment où on l'attend le moins. Je plongeais mon regard quelques instant dans le sien sans en déceler réellement quoi que ce soit. Je voulais simplement être certaine de me souvenir de son visage, et je reportais finalement moi regard ailleurs en répondant à sa question. Si je pouvais lui donner des informations autant que je le fasse. Arya avait disparu mais elle était en vie. J'en avais la certitude. J'espérais qu'elle sache se débrouiller. Les routes étaient dangereuse pour une jeune femme aussi tête brûlée soit elle. Je dus avouer que je ne pouvais aller plus loin sur ce sujet.

Je ne sais pas pourquoi mais j'avais confiance en ce frère de la garde. Il était la seule personne capable de m'en apprendre plus sur Winterfell ou ma famille pour le moment. Je souffrais de leur absence, je souffrais de ne pas savoir. C'était risqué pour moi de demander ses informations, comme de les connaître. Ca devrait rester secret. Personne ne devrait savoir. Je me mordillais la lèvre inférieur en l'entendant. Robb était en campagne et Winterfell entre les mains de mon si jeune frère. La situation ne pouvait être pire, pour le moment du moins. _" D'accord." Je fis rapidement disparaître les stigmates de l'appréhension et la peur de mon visage. J'eus à nouveau un léger sourire. _" Espérons le." Il me proposa son aide. J'hésitais un moment. Oh j'avais des idées et même de nombreuses propositions à faire mais ce ne serait d'abord pas raisonnable, ensuite dangereux, aussi bien pour moi que pour cet homme. Je ne pouvais pas en âme et conscience le mettre ainsi en danger. _" Vous avez déjà fais plus que n'importe qui ici." Je détestais Port-réal même si je ne l'avouais pas. L'une de mes "dames" s'approchaient déjà de nous. J'aurais pu la congédier mais mieux ne valait pas éveiller les soupçons. _" Sachez qu'à Port-Real les murs ont des oreilles. On ne peut faire confiance à qui que ce soit. " Je passais mes doigts dans une de mes mèches de cheveux, et hochais la tête en direction de ma servante avant de reposer mon regard sur lui. _" Nous nous reverrons très certainement avant votre départ." Je sous-entendais que ce n'était pas vraiment négociable. Je le gratifiais d'un mouvement de tête avant de m'éloigner !

Il ne faisait aucun doutes que le Nord n'oubliait jamais, et que le Nord se vengerait de ce qui était arrivé. Si le Nord pouvait également venir sauver la jeune femme ce serait vraiment quelque chose de bien. Et pourtant, visiblement Robb avait d'autres choses à faire. Non. Ce n'était pas possible. Il ne tarderait pas à descendre avec les armées du Nord et du Conflans. J'en étais sure. J'avais foi en les Stark, et ils ne m'avaient jamais décus. Je restais cependant silencieuse un moment, jusqu'à ce qu'elle ne me demande comment les choses allaient à Winterfell. La encore, hors de question de mentir. La ville était dans les mains de son jeune frère infirme, son frère menait une armée, et sa mère l'avait probablement retrouvé. Ce n'étaient pas la des nouvelles que l'on avait envie d'entendre…. Et pourtant il fallait bien les lui dire.

Je ne pouvais qu'admirer la façon dont elle dissipait la peur sur son visage, comme si elle était habituée à porter ce masque depuis bien longtemps maintenant. Elle renvoyait l'image que les autres voulaient voir, et mon coeur se serrait d'imaginer ce qu'elle devait endurer aussi jeune. C'était, en plus du respect et de l'honneur, une des raisons pour les quelles je lui demandais si je pouvais faire quelque chose pour elle. Je… Ouais, je pouvais bien me mettre en danger si il le fallait. Si elle avait besoin. Et je devais avouer que l'idée de la ramener avec moi à Winterfell était énormément tentante. Cependant, a moi seule, je ne ferais pas un pli contre les gardes du palais. D'autant plus que je n'étais qu'une archère. Pas réputé pour être très résistant face aux coups d'épées tout ça.

Cependant, elle ne semblait rien vouloir me demander, et je hochais la tête doucement. J'avais déjà fais plus que n'importe qui ? Ils ne devaient pas… Enfin, nous savions que Port-Réal n'était pas une ville où il faisait bon vivre, et probablement pas maintenant. Je restais silencieuse un moment en l'écoutant me conseiller la méfiance. « Je n'en doute pas ma dame. Je ferais attention. » J'aurais aimé lui dire qu'elle pouvait me faire confiance. Mais, les gens qui disaient ça étaient souvent des traitres, et je supposais qu'elle le saurait de toutes les manières.

Déjà sa servante revenait vers nous, et elle se préparait à partir, je m'inclinais respectueusement. « Bien entendu. Je passerais vous faire mes hommages avant mon départ. N'en doutez pas. » Pas un mot de plus, je la regardais s'éloigner quelques instants, avant de perdre mon regard dans le vague, vers le port, puis vers le palais. Il était temps d'aller prendre un peu de repos avant d'aller explorer les donjons. J'étais… maussade à cette idée la. Et légèrement déprimée par la perspective que les gens biens finissent toujours par souffrir. Mon inutilité face à la détresse des Stark, me déprimait assez.

[ Fin ]

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